Boycott et résistance : Israël et Afrique du Sud (14 novembre 2009)
Le boycott d’Israël prend une ampleur jamais vue grâce à la
campagne BDS (Boycott, Désinvestissements et Sanctions), portée par des
militants du monde entier. Il s’élargit de jour en jour.
Certains arguments pour le boycott international d’Israël le
présentent comme le moyen nouveau et ultime pour faire aboutir les droits du peuple
palestinien, tous les autres ayant échoué. Selon ces pacifistes, le boycott est
un moyen plus efficace que la résistance armée des Palestiniens. Cette
argumentation s’appuie généralement sur le modèle du boycott contre l’apartheid
en Afrique du Sud. Dans cette optique, l’abolition de l’apartheid et la
libération de Nelson Mandela auraient essentiellement été le résultat du
boycott international.
La vérité historique est un peu plus nuancée.
Rappelons d’abord que le boycott d’Israël est un mot d’ordre
très ancien. Dans les années 80, les anti-impérialistes boycottaient de la même
façon les pamplemousses de Jaffa ou les avocats de Carmel que les oranges
d’Outspan ou les pommes du Cap. Ce qui a rendu aujourd’hui le boycott d’Israël
plus massif et populaire, c’est avant tout le massacre sauvage de la population
de Gaza par Tsahal et la résistance acharnée des combattants palestiniens. La
victoire de la résistance libanaise de 2006, dirigée par le Hezbollah, avait
déjà préparé le changement dans l’opinion internationale.
La lutte pour l’abolition de l’Apartheid en Afrique du Sud
peut effectivement servir de référence à la lutte actuelle pour la Palestine, à
condition que son histoire soit restituée fidèlement. La place du boycott
international dans cette histoire doit être correctement évaluée.

C’est Mandela, qui trois ans auparavant, a créé la branche
armée de l’African National Congress ( ANC), l’Umkhonto We Siswe (« lance de la
Nation »). Quand il est arrêté en 1962, après dix-sept mois de clandestinité,
c’est sous l’inculpation de sabotage et de tentative de renversement violent du
gouvernement. C’est grâce à sa défense sans compromis de la lutte
révolutionnaire de son peuple que Mandela a reçu un large soutien international
et qu’il est devenu le plus célèbre prisonnier politique du monde.
Après le massacre de Soweto, en 1976, Nelson Mandela adresse
une lettre au peuple sud-africain, dans laquelle il affirme prier avec lui pour
les martyrs tout en appelant la jeunesse à s’engager massivement dans la lutte.
Suite à cet appel, des milliers de jeunes sud-africains partiront s’entraîner
pour la lutte armée au Mozambique et en Angola.
A plusieurs reprises, inquiet de la popularité toujours
croissante du prisonnier Nelson Mandela, le gouvernement sud-africain lui
proposera sa libération, à condition que Mandela rejette la lutte armée comme
arme politique. La réponse de Mandela a toujours été très claire : c’était non.
La jeunesse d’aujourd’hui a le droit de savoir que l’arme du
boycott international contre l’apartheid en Afrique du Sud a fonctionné comme
un soutien à la lutte révolutionnaire du peuple et de ses organisations
nationales. Que le peuple sud-africain a utilisé tous les moyens à sa
disposition pour renverser le régime raciste, allié d’Israël, et mis en place
par la colonisation. Et que c’est cette lutte de masse, y compris la lutte
armée, qui a permis au boycott international de fonctionner comme un puissant
levier de solidarité mondiale.
La jeunesse d’aujourd’hui a le droit de savoir que le
résistant Mandela, chrétien d’abord pacifiste puis organisateur de la lutte
armée et allié des communistes, a été un des premiers combattants à recevoir le
titre honorable de « terroriste ». Son organisation, l’ANC, dont il était
membre depuis 1943, a été mise hors-la-loi en 1960 par le gouvernement
sud-africain. Condamné en 1964 pour terrorisme, l’administration Bush ne le
retirera de sa « Terror watch list » qu’en juillet 2008 !
La jeunesse d’aujourd’hui a le droit de savoir qu’au nom de
cette lutte contre le terrorisme, le gouvernement sud-africain, tout comme le
gouvernement israélien aujourd’hui, a non seulement emprisonné des centaines de
combattants mais également commandité l’assassinat ciblé, par des escadrons de
la mort, de dizaines de responsables politiques du mouvement de libération
sud-africain.
Tout comme le massacre de Gaza et la résistance armée de
l’hiver 2008-2009, c’est le massacre de Soweto et le développement de la lutte
de masse qui s’ensuivit, en 1976, qui a donné son ampleur internationale au
mouvement de boycott, dont les premières sanctions avaient commencé dès la fin
des années soixante.
La liquidation de l’apartheid en Afrique du Sud a ainsi été
le résultat d’une combinaison constante entre tous les moyens de lutte sur le
terrain et la solidarité internationale, dont le boycott fut le point
culminant.
Le boycott du sionisme existe depuis sa mise en œuvre par la
Ligue arabe en … 1945 ! Et depuis 1948, c’est avant tout la résistance acharnée
du peuple palestinien, par tous les moyens dont il dispose, qui tient en échec
le colonialisme et les guerres permanentes du sionisme. Et c’est parce que le
peuple palestinien continue de résister que nous devons développer de toutes
nos forces le mouvement de boycott d’Israël qui commence enfin à prendre
l’ampleur nécessaire.
Le boycott n’est pas une alternative à la résistance, c’est
un soutien à la résistance. Et pour que ce soutien soit complet et cohérent, il
doit comprendre l’appel à retirer le Hamas, le FPLP et toutes les organisations
palestiniennes de résistance des listes d’organisations terroristes, avec
autant de passion que nous avons chanté et crié pendant des années « Free
Nelson Mandela ».
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