Deux peaux, deux classes, deux mesures, par Luk Vervaet et Nadine Rosa-Rosso
Le 5 décembre 2018, Sanda Dia, 20 ans, un
étudiant métis à la KUL, Katholieke Universiteit van Leuven, a succombé à son « baptême »
organisé au sein du cercle étudiant Reuzegom, dans un local scout isolé.
Reuzegom, peut-on lire dans la presse, est
un club élitaire, composé d’étudiants anversois, qui sont fils d’un papa
huissier, banquier, juge du tribunal de première instance ou haut-placé dans
les institutions européennes. Membre aussi, mais pas présent lors des faits
commis contre Sanda, le fils de la gouverneure d’Anvers.
Par le passé, cette bande de dégénérés de « type
caucasien » avait déjà défrayé la chronique quand ils se filmaient lors de
baptêmes en train d’égorger des lapins ou de faire avaler du Dettol à un porcelet
avant de lui tirer une balle dans la tête trois jours plus tard et de lui
arracher le cœur.
Après la mort d’un homme (!), Sanda, dix-huit
des membres de Reuzegom seront envoyés à la Chambre de conseil qui se tiendra
en septembre 2020, près de deux ans après les faits, et qui décidera de leur renvoi
ou non devant le tribunal correctionnel. Personne de ce beau monde n’a été
arrêté, et encore moins a-t-il dû rester en prison !!! Personne n’a reçu
une interdiction de se rendre à d’autres fêtes, de quitter sa maison ou l’obligation
de notifier sa présence à la police. Malgré la colère suscitée par ses actes,
il n’est venu à l’esprit de personne de stigmatiser l’ensemble de la communauté
estudiantine flamande. L’université ne les a même pas renvoyés.
En août 2020, trois jeunes de « type
nord-africain » sont arrêtés et enfermés après une bagarre sur la plage à
la côte de Blankenberge. Les jeunes restent en prison au moins jusqu’à leur
comparution devant la chambre du conseil à Bruges. Les syndicats de police se
disent inquiets et veulent agir contre la « racaille bruxelloise qui sévit
à la Côte et ailleurs ». Les syndicats de police souhaitent que la
violence envers les policiers soit combattue. « Nous voulons la tolérance
zéro promise ». La NVA et le Vlaams Belang convoquent en urgence, et en
pleine crise corona (!), la commission parlementaire de l’Intérieur. Le
ministre De Crem y déclare que « des gangs comme ceux responsables de la
bagarre à Blankenberge doivent être traités durement et impitoyablement ».
Il se déclare favorable à leur interdiction d’accès à des lieux, par voie
judiciaire ou administrative, sur l'ensemble du littoral s’il le faut et si
nécessaire pour toutes les zones de loisirs dans le pays. Les personnes
concernées doivent se présenter à la police de leur lieu de résidence dans des
circonstances spécifiques - comme une vague de chaleur.
Si on compare la gravité des faits, une
bagarre qui éclate sous l’effet de la chaleur, du manque d’espace, de l’alcool
ou autres produits, sans faire aucune victime grave, et l’organisation
planifiée en bande d’actes de torture pendant plusieurs jours jusqu’à entrainer
la mort, il n’y a pas de doute possible : on a affaire avec une politique
de classe et de race qui se manifeste aussi dans la justice.
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